Charles Francis dit adieu à la compétition
NATATION. Après avoir goûté au rêve olympique, Charles Francis met un terme à sa carrière de nageur. L’athlète de 26 ans accroche son maillot, renonçant du même coup à une seconde participation olympique à Rio en 2016. Il entend malgré tout garder un pied près des bassins.
La décision de ranger le maillot mijotait depuis quelques mois dans l’esprit de Charles Francis. «Ce n’est pas une décision que j’ai prise à la légère. J’y pensais depuis le début de l’année scolaire, mais j’ai pris une décision finale en janvier dernier», fait remarquer le natif de Cowansville.
Francis aura participé à une dernière compétition, le Championnat provincial de natation universitaire, il y a une quinzaine de jours à Montréal. Il s’entraînait jusqu’à tout récemment d’ailleurs avec les Carabins de l’Université de Montréal.
Plusieurs éléments de la vie extérieure au sport de haut niveau expliquent la décision du jeune homme. «J’ai concilié le sport et les études à l’intérieur du présent cycle olympique. Je me suis rendu compte qu’il y a autre chose en dehors du sport de haut niveau. J’ai un grand intérêt pour les études, j’ai trouvé un domaine que j’adore [traduction]. Ça a été plutôt facile de faire le “switch” et ça a fait du bien de prendre le temps de voir du monde, de voir ma famille. Je peux mettre les énergies que je consacrais au sport dans ces activités-là désormais.»
Charles Francis affirme s’être ouvert à d’autres sports, lui qui pratique maintenant la course à pied, le ski de fond et le vélo. «La natation, c’est un sport et un mode de vie que j’adorais et qui m’ont apporté beaucoup, mais j’en ai découvert un autre qui m’intéresse tout autant», résume-t-il.
Le nageur cowansvillois a mis du temps avant de délaisser l’équipe canadienne, d’autant que les nageurs atteignent leur sommet vers l’âge de 28 ans. «J’ai eu un pincement, mais j’ai eu le temps de faire la paix avec ce choix. Je suis très à l’aise avec ma décision, je n’ai aucun regret. Oui j’aurais été dans la belle tranche d’âge de mon sport, mais en même temps, il faut que le cœur et la volonté de faire les sacrifices y soient. Je savais que si je voulais retourner aux Olympiques, c’était pour mieux performer, pas seulement d’être là comme participant.»
La «mère extraordinaire»
Le Cowansvillois d’origine a toujours pu compter sur le soutien de la communauté qui l’a vu naître. Et il lui en sera éternellement reconnaissant. «Sans tout ce support, je n’aurais jamais pu me rendre où je me suis rendu. C’était essentiel et ça fait chaud au coeur. J’étais fier de représenter Cowansville.» Nombreux ont été les évènements organisés pour lui assurer le support financier nécessaire à la pratique de son sport, estimé à environ 10 000$ par année. «J’ai eu une mère extraordinaire qui faisait des pieds et des mains pour m’enlever le poids financier des épaules. Je n’avais pas à subir ce stress-là. C’était une tâche qu’elle devait faire à l’année. J’ai eu de bons coups de chance, parce que j’ai manqué très peu de camps d’entraînement à cause des questions financières.»
Cette dernière affirme d’ailleurs bien vivre avec le choix de son fils. «Je suis très contente de la décision de Charles et je suis très fière de lui. Ça lui appartient et je l’appuie entièrement dans sa démarche. Nos enfants, on leur promet de les suivre dans tous leurs projets. On l’aurait fait jusqu’à Rio en 2016, mais c’est un soulagement, parce que c’est fait de façon très saine et positive», convient Diane Francis, elle aussi nageuse.
Les débuts
Avant de s’engager dans les couloirs de la scène sportive mondiale, Charles Francis a effectué ses premières longueurs dans la piscine du centre aquatique de Cowansville. Ses intentions de faire de la natation de compétition se sont précisées vers l’âge de douze ans. Il a alors été pris en charge par l’entraîneuse Nathalie Leduc. Il s’est développé en tant que spécialiste du dos; ses épreuves de prédilection demeuraient le 50 m et le 100 m. Il a fait le saut à Montréal en 2005, dans le cadre de ses études collégiales.
C’est cette année-là justement, à l’âge de 16 ans, qu’il reçoit un coup de fil inattendu, qui le mènera à une première compétition à l’étranger, une participation aux Jeux olympiques de la Jeunesse (JOJ) en Australie. «Nathalie [Leduc] m’a appelé pour me dire que j’avais été sélectionné pour faire partie de l’équipe, et je ne savais même pas que je m’étais qualifié. Je m’en rappelle comme si c’était hier.» Il reviendra de l’hémisphère austral une médaille de bronze au cou, obtenue dans l’épreuve du 200 m dos.
Charles Francis place toutefois son passage sur la plus grande scène sportive du monde comme son moment le plus marquant. Aux Jeux olympiques de Londres en 2012, il a fini dans le top 15 au 100 m dos. Il a disputé une finale olympique en tant que membre de l’équipe du relais 4×100 m quatre nages (avec Brent Hayden, Andrew Scott Dickens et Joe Bartoch), qui a pris le 8e rang. On se rappellera également que le nageur était passé à quelques centièmes de secondes de connaître son baptême olympique à Pékin en 2008. «C’est l’aboutissement d’une carrière. De participer à une finale olympique, c’est quelque chose de particulier.»
Jamais loin
Le bassin, qui a si bien servi sa vie sportive, Charles Francis ne souhaite pas s’en éloigner, malgré son retrait des compétitions. «Je me vois continuer de graviter autour. Je vais voir à quel point je peux m’impliquer en tant que bénévole, question de partager mon expérience avec les jeunes, de leur redonner ce que le sport m’a apporté. Je vais continuer de suivre les résultats de l’équipe canadienne. J’ai des amis qui visent Rio, je vais les supporter.» Il n’exclut pas non plus de redonner des conférences pour perpétuer le bagage acquis au fil des années. «C’était une montagne russe d’émotions. J’ai profité des bons moments et je pense avoir tiré profit des moins bons. C’était une très belle expérience», conclut celui qui a amorcé un baccalauréat en traduction à l’Université de Montréal en septembre dernier.